vendredi 21 octobre 2016

Spin-Off ou retour à la case départ ?



A l’annonce en juin 2011 de l’acquisition de Diversey par le groupe Sealed Air décidée par Bill Hickey, le marché avait mal réagi, l’action Sealed Air chutait de 22% les jours suivants. Au total sur la période, c’est plus de 2 milliards de dollars de capitalisation boursière sur le titre qui sont partis en fumée.
Les financiers ne semblaient pas voir les synergies que la communication Sealed Air disait déceler entre les deux entités... lesquelles étaient pourtant sensées justifier l’achat pour 4,3 milliards de dollars en cash, d’une société dont la valeur était alors estimée plutôt autour de 2 milliards de dollars.

Cette acquisition a eu pour effet de multiplier par 4 la dette du groupe, portant cette dernière à 6,5 milliards de dollars cependant que les capitaux propres étaient divisé par 2 suite à la dépréciation de 1,9 milliards de dollars relative à des unités Diversey basées en Amérique et en Europe. Le niveau de cash dégagé par l’activité, est alors à peine supérieur à ce qu’il était avant l’opération de fusion.

Cette situation plaçait de facto le groupe entre les mains de ses créanciers, et leur bon vouloir en matière de rééchelonnement de sa dette ou pas.

En 2013 et 2014, la hausse du taux d’endettement au regard des capitaux propres continue : il atteint 368 % fin 2014. Pour l’année 2014, la charge d’intérêts s’est élevée à 288 M$, avec un taux d’intérêt moyen de 6.5%. Le retour sur investissement devient beaucoup trop long sur l’acquisition de Diversey. Potentiellement il est de 17 ans au vu du faible EBITDA de Diversey (240 millions $ comparé au coût d’acquisition de 4.3 milliards $), ce qui pèse sur les liquidités du groupe et pompe tout le cash dégagé par l’activité traditionnelle de Sealed Air. En revanche, les dividendes versés aux actionnaires restent stables : 0.52 $ par action soit un total de 110.9 M$ en 2014, ainsi que les rachats d’actions qui se sont encore élevés à 184 M$.

En 2015, grâce à son activité, le groupe dégage un flux net de cash de 968 M$, mais 80% du cash généré par l’activité est consacré aux activités financières :
Sur les 968 M$ de cash dégagé par l’activité du groupe, 100M$ sont utilisés pour la distribution des dividendes et 800 M$ pour le rachat d’actions propres.
Il ne reste donc plus beaucoup de marge de manœuvre pour investir (60M$ de cash net sur les opérations d’investissement) et se désendetter.
Le taux d’endettement du groupe Sealed Air atteint des sommets : 816% de ses capitaux propres fin 2015.
Cette hausse n’est pas due à une augmentation des dettes financières qui restent stables à 5 milliards de dollars, mais à une baisse significative des capitaux propres qui sont divisés par 2 : la principale explication est le rachat de ses propres actions pour un montant de 800M$.
Alors pourquoi ce spin-off qui semble nous ramener 5 ans en arrière ?
Est-ce parce que les efforts consentis par les salariés (qui n’ont pas vraiment eu le choix) ces dernières années pour réduire les coûts et accroître le niveau de cash dégagé ne suffisent pas à éponger la dette contractée de façon déraisonnable ? Sans doute…, car visiblement, proclamer le « change the game !» n’a pas été suivi d’effets propres à développer le chiffre d’affaires comme espéré.
L’objectif est-il de tenter de vendre Diversey en expliquant que sa profitabilité a été restaurée afin d’éponger une partie de la dette ? C’est possible, mais cela peut-il suffire ?
La question centrale du moment est de savoir comment cette dette colossale sera partagée entre les deux nouvelles entités ?
Ce qui est sûr, c’est que cette gestion financière qui profite aux banques, aux actionnaires et à quelques dirigeants n’épargnera pas les salariés au premier rang desquels ceux des fonctions supports qui ont déjà été bien mis à l’épreuve par la fusion.